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Reclassement du salarié protégé inapte : les précisions du médecin du travail postérieures à son avis comptent

En matière d'inaptitude, les règles protectrices instituées en faveur des représentants du personnel se combinent avec les dispositions des articles L. 1226-2 et L. 1226-10 du code du travail prévoyant le reclassement du salarié devenu inapte à son emploi. Ainsi, avant d'autoriser le licenciement d'un salarié protégé sur ce motif, l'inspecteur du travail doit s'assurer de la régularité de la procédure interne à l'entreprise, de la matérialité de l'inaptitude médicale, de l'absence de discrimination mais également du caractère réel et sérieux des efforts de reclassement.


Qu'en est-il lorsque le médecin du travail, sollicité par l'employeur, apporte des précisions postérieurement à son avis d'inaptitude limitant le champ du reclassement possible ?

Dans cette affaire, une salariée protégée auxiliaire de vie est victime d'un accident du travail. A son retour, le médecin du travail conclut à l'inaptitude de l'intéressée à son poste de travail. Cet avis est confirmé à la seconde visite de reprise.
Le médecin préconise un reclassement dans un poste sédentaire, situé à Colmar, et n'imposant pas de déplacements. A la demande de l'employeur, par courrier, ce même médecin a apporté des précisions sur la possibilité de reclassement et confirmé que la recherche devait s'effectuer dans la commune de Colmar. L'employeur propose donc deux postes sédentaires sur cette seule ville, mais la salariée les refuse, et l'employeur la licencie sur autorisation de l'inspecteur du travail.
Le tribunal administratif rejette la demande d'annulation de cette décision mais la cour administrative d'appel y fait droit.
Pour la cour, ces propositions ne suffisent pas à établir que l'employeur a envisagé toutes les possibilités de reclassement au sein des différentes antennes de l'association. Les juges ajoutent que s'il est vrai que l'employeur est tenu de suivre les préconisations du médecin du travail, la circonstance que ce dernier a fixé le périmètre de la recherche de reclassement au territoire de Colmar « ne dispensait pas l'employeur de poursuivre la recherche de reclassement, au besoin dans les autres départements où ses antennes sont implantées, et de proposer à l'intéressée tout emploi compatible avec son état de santé, en subordonnant sa proposition de reclassement à la condition qu'elle déménage à proximité du nouveau lieu d'exécution de son contrat pour tenir compte des préconisations du médecin. »


Mais le Conseil d'État n'est pas d'accord.
Les juges expliquent que « lorsqu'après son constat d'inaptitude, le médecin du travail apporte des précisions quant aux possibilités de reclassement du salarié, ses préconisations peuvent, s'il y a lieu, être prises en compte pour apprécier le caractère sérieux de la recherche de reclassement de l'employeur. »
Ainsi, l'employeur peut se prévaloir des échanges qu'il a eus, après le constat d'inaptitude, avec le médecin de travail sur les possibilités de reclassement d'une salariée protégée en vue de justifier du caractère sérieux de sa recherche de reclassement.
Remarque : à noter que la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation en matière d'inaptitude des salariés « ordinaires » a déterminé que l'existence d'un dialogue entre l'employeur et le médecin du travail tout au long du contrat de travail et après l'avis d'inaptitude du médecin du travail montre que l'employeur justifie de recherches effectives de reclassement au regard des préconisations du médecin du travail (Cass. soc., 27 janv. 2016, n° 14-20.852). Ainsi, les réponses apportées, postérieurement au constat régulier de l'inaptitude par le médecin du travail, sur les possibilités éventuelles de reclassement concourent à la justification par l'employeur de l'impossibilité de remplir cette obligation (Cass. soc., 1er févr. 2017, n° 15-26.207 ; Cass. soc., 21 déc. 2017, n° 16-14.532). Le Conseil d'État fait application de ces principes dans cette affaire en validant la prise en compte par l'employeur de précisions apportées par le médecin du travail après l'avis d'inaptitude dans le cadre de la recherche de reclassement du salarié protégé.

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